Avoir ou Être ?

 archétypes maquette 2 « La dépression cause des dommages épouvantables. Adonnez-vous à n’importe quel passe-temps du moment que vous pensez qu’il peut vous apporter de la joie. » La Chaise Vide – R. Na’hman de Braslav – Maître ‘Hassidique.

Le Maître désigne un état que les spécialistes classent dans la rubrique des pathologies. Or, les troubles dont parle Rabbi Na’hman ne résulteraient-ils pas également d’une sorte de discorde entre le désir d’avoir et le désir d’être ?

En effet, qui ne s’est jamais senti comme un grain de sable abandonné sur les rives d’un univers muet ? Pour corriger cette sensation insupportable, l’humain a cru judicieux d’apaiser ses angoisses en tentant de remplir un terrible manque par l’acquisition de biens matériels. Et, pour rivaliser avec l’immensité de l’univers, il s’est mis en tête de se créer des situations sociales privilégiées afin d’atteindre dans son existence une position dominante.

En somme, comme l’Adam de la Genèse, il aspire à une toute-puissance comparable à celle d’un dieu. Et, comme cette dignité lui est inaccessible, alors il déprime !

Voici des objectifs épuisants, parce qu’ils lui demandent beaucoup d’efforts et ne lui procurent en fait que des satisfactions passagères. Il reste en permanence sur sa faim car une satisfaction en appelle une autre. Bref ! Il devient l’esclave des exigences imposées par ses envies. Il s’ensuit qu’il est sans cesse en quête d’avoir, de tout posséder, que ce soit

des objets et même des personnes ou des animaux… Connaît-il pour autant le plaisir d’exister ? Même pas ! Car, selon ses ambitions, la satisfaction de ses désirs s’avère périlleuse parce qu’elle dépend des moyens nécessaires pour atteindre son objectif.

Et c’est là que l’édifice artificiel commence à vaciller…

Désarmé face à cet inflexible mécanisme, il se sent de plus en plus comme un grain de sable abandonné sur les rives d’un univers muet ! Parfois, et dans un sursaut de défense, il se dresse contre ce système auquel adhèrent pourtant ses aspirations. Entend-il seulement ses propres contradictions ? A la société gérée selon les règles de l’avoir, il réclame davantage de moyens pour satisfaire avantageusement son besoin de posséder, sournoisement excité de nos jours, par la voix alléchante des actions publicitaires. Or, elles interpellent tout le monde mais frustrent le plus grand nombre. Car, dans ce domaine, la justice et l’égalité sont soumises à la loi du plus fort et il devient inacceptable d’entendre qu’avoir c’est être !

Il faut en outre reconnaître que ce système est de plus en plus cerné par des perspectives inquiétantes. Et pour cause ! Les talents de l’humain sont progressivement dédaignés, voire inexploités, puisqu’un robot semble désormais avoir plus d’intérêts que lui. Comment peut-on alors s’étonner de la progression de ce mal-être qui devient universel? Pourquoi ne pas envisager l’efficacité d’un art de vivre où s’atténueraient les dommages de la discorde établie entre le désir d’avoir et le désir d’être ? Car, pour beaucoup de peepaul, il n’existe d’autre solution que de compenser des effets négatifs par d’autres effets tout aussi négatifs. C’est le signe qu’ils commencent à perdre l’intérêt et l’estime de soi. Là, on ne peut que constater les dommages épouvantables dont parle le Maître, parce qu’ils sont nourris par un sentiment douloureux : celui de ne plus se sentir vivant

Alors, il nous fait une proposition : s’adonner à n’importe quel passe-temps pourvu qu’on pense qu’il peut nous apporter de la joie. Enfin un sentiment réellement enviable ! A condition de bien comprendre qu’il s’agit de celui qui exalte la conscience et répand ses bouffées de vie en restaurant l’harmonie intérieure ! Voici un véritable privilège lorsqu’on se sent exister au lieu de posséder pour croire que l’on est. Ainsi, qui dit passe-temps dit divertissement, jeu, sport, etc… mais aussi créativité parce c’est un moyen de s’exprimer, de révéler tout ce que l’on porte en soi. Il s’agit alors de pratiquer une activité, un art, une étude, tout ce qui permet à chaque humain d’apprendre à connaître son pouvoir de création, cette inestimable richesse qui ne demande qu’à surgir de son intime réalité. C’est alors qu’il pourra faire scintiller l’étincelle qui le rend vivant parce qu’il commencera à éprouver la délectable sensation d’être.

C’est un don du Vivant et il est gratuit…

retour à l’accueil

 

 

2 réflexions sur « Avoir ou Être ? »

  1. AVOIR et ÊTRE
    Yves DUTEIL

    Loin des vieux livres de grammaire,
    Écoutez comment un beau soir,
    Ma mère m’enseigna les mystères
    Du verbe être et du verbe avoir.

    Parmi mes meilleurs auxiliaires,
    Il est deux verbes originaux.
    Avoir et Être étaient deux frères
    Que j’ai connus dès le berceau.

    Bien qu’opposés de caractère,
    On pouvait les croire jumeaux,
    Tant leur histoire est singulière.
    Mais ces deux frères étaient rivaux.
    Ce qu’Avoir aurait voulu être
    Être voulait toujours l’avoir.
    À ne vouloir ni dieu ni maître,
    Le verbe Être s’est fait avoir.

    Son frère Avoir était en banque
    Et faisait un grand numéro,
    Alors qu’Être, toujours en manque
    Souffrait beaucoup dans son ego.

    Pendant qu’Être apprenait à lire
    Et faisait ses humanités,
    De son côté sans rien lui dire
    Avoir apprenait à compter.

    Et il amassait des fortunes
    En avoirs, en liquidités,
    Pendant qu’Être, un peu dans la lune
    S’était laissé déposséder.

    Avoir était ostentatoire
    Lorsqu’il se montrait généreux,
    Être en revanche, et c’est notoire,
    Est bien souvent présomptueux.

    Avoir voyage en classe Affaires.
    Il met tous ses titres à l’abri.
    Alors qu’Être est plus débonnaire,
    Il ne gardera rien pour lui.

    Sa richesse est tout intérieure,
    Ce sont les choses de l’esprit.
    Le verbe Être est tout en pudeur
    Et sa noblesse est à ce prix.

    Un jour à force de chimères
    Pour parvenir à un accord,
    Entre verbes ça peut se faire,
    Ils conjuguèrent leurs efforts.

    Et pour ne pas perdre la face
    Au milieu des mots rassemblés,
    Ils se sont répartis les tâches
    Pour enfin se réconcilier.

    Le verbe Avoir a besoin d’Être
    Parce qu’être, c’est exister.
    Le verbe Être a besoin d’avoirs
    Pour enrichir ses bons côtés.

    Et de palabres interminables
    En arguties alambiquées,
    Nos deux frères inséparables
    Ont pu être et avoir été.

    J’aime

Laisser un commentaire

Partage de savoir-faire, de connaissances, d'opinions avec humour et bonne humeur.